En Afrique, l’exploitation des énergies fossiles reste massivement destinée aux besoins de l’Occident

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Une torchère dans une usine de traitement de GNL exploitée notamment par Shell à Bonny Island, au Nigeria, en juin 2017


Selon un rapport publié lors de la COP27, deux tiers des nouveaux projets développés sur le continent sont portés par des multinationales étrangères et la majorité sont tournés vers l’exportation.

 

Alors qu’il faudrait cesser d’investir dans de nouveaux projets d’énergie fossile pour conserver des chances de limiter le réchauffement en dessous de 1,5 °C, l’Afrique demeure un champ actif de prospection pour les majors occidentales. Des projets d’exploration et d’exploitation de réserves récemment découvertes sont en cours dans 48 pays du continent, selon le rapport « Qui finance l’expansion des énergies fossiles en Afrique ? », rendu public mardi 15 novembre à Charm El-Cheikh (Egypte), où se déroule la conférence des Nations unies sur les changements climatiques (COP27).


« Deux tiers de ces projets sont portés par des multinationales dont le siège se trouve hors d’Afrique et la majorité sont tournés vers l’exportation pour satisfaire les besoins occidentaux », explique Heffa Schücking, directrice de l’ONG allemande Urgewald et coautrice du rapport avec une trentaine d’associations africaines.

Environ 16 milliards de barils supplémentaires d’équivalent pétrole devraient être produits d’ici à 2030, représentant deux années d’émissions de l’Union européenne. Présente dans quinze pays, la compagnie française TotalEnergies est le premier acteur de cette expansion, avec 14 % de la production à venir, selon le rapport. Le projet ougandais d’exploitation pétrolière Tilenga, avec son pipeline chauffé de 1 440 km à travers la Tanzanie – baptisé East African Crude Oil Pipeline (EACOP) –, en fait partie.

Désastres écologiques


« De la Mauritanie au Mozambique, l’addiction de l’Europe aux énergies fossiles est un puissant moteur du développement de projets d’infrastructures de production de gaz naturel liquéfié (GNL) sur le continent, déplore Amos Wemanya, du club de réflexion Power Shift Africa. Ces projets de plusieurs milliards de dollars conduisent les pays africains à s’endetter davantage et les détournent d’une transition vers les énergies renouvelables. C’est mauvais pour le climat comme pour le développement de l’Afrique. »

Le plaidoyer contre les énergies fossiles n’est pas seulement mené au nom de la lutte contre le dérèglement climatique. Il s’appuie aussi sur le bilan de décennies d’expérience au terme desquelles 600 millions d’Africains demeurent sans accès à l’électricité ; quand l’exploitation pétrolière ne s’accompagne pas, de surcroît, de désastres écologiques, comme dans le delta du Niger au Nigeria.


« Nous voulons une transition vers une énergie propre, renouvelable et qui serve vraiment la population africaine », demande Omar Elmawi, directeur de la campagne « Stop EACOP ». Un discours qui tranche avec celui des chefs d’Etat africains qui, à l’ouverture de la COP27, ont demandé à pouvoir exploiter les énergies fossiles du continent pendant encore plusieurs décennies.

La géographie des gazoducs et oléoducs en projet à travers le continent dessine également la réalité d’une industrie presque entièrement tournée vers l’Europe ou l’Asie. Le rapport comptabilise plus de 20 000 km de tuyaux, soit de quoi joindre « le pôle Nord au pôle Sud », dont seulement un quart est dévolu partiellement à l’Afrique.

Hypocrisie des entreprises


Derrière chaque projet de développement des hydrocarbures en Afrique, « il y a des banques, des assureurs, des investisseurs occidentaux, sans lesquels ils ne pourraient pas voir le jour », pointe Heffa Schücking en dénonçant l’hypocrisie de ces entreprises qui, pour la majorité d’entre elles, affichent un objectif de neutralité carbone d’ici à 2050 : « Elles prétendent s’aligner sur l’accord de Paris pour limiter la hausse des températures à 1,5 °C, mais c’est un monde à 3 °C de plus qu’elles financent. »

En juillet, 5 000 investisseurs institutionnels détenaient des actions ou des obligations dans des entreprises développant de nouveaux projets fossiles en Afrique. Les 23 premiers détenaient à eux seuls 50 % de ce portefeuille, avec dans le trio de tête les américains BlackRock et Vanguard et le fonds de retraite gouvernemental norvégien. Le Crédit agricole arrivait en neuvième place. Parmi les banques commerciales continuant de soutenir massivement à travers des prêts les projets d’énergie fossiles figurent en bonne place des établissements français : BNP Paribas, Société générale, Crédit agricole et BPCE.

Cet état des lieux fait écho à une autre évolution préoccupante : l’an dernier, les investissements dans les énergies renouvelables ont chuté de plus de 30 % en Afrique, pour revenir à leur plus bas niveau depuis onze ans, selon l’étude publiée le 9 novembre par BloombergNEF. En dépit d’énormes potentiels, le continent a capté seulement 0,6 % des 434 milliards de dollars investis dans les énergies renouvelables à travers la planète en 2021.

Par Laurence Caramel

Source : https://www.lemonde.fr/

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