Affaire de la décennie : Pourquoi Aziz fait-il si peur ?

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Description

Quinze années d’exercice du pouvoir, dont dix pleinement et sans partage. Une fortune colossale. Des soutiens dans le monde financier, politique, et d’autres plus occultes au sein de l’institution militaire.

Un sentiment profond d’avoir été trahi. Une hargne de revenir au pouvoir pour régler des comptes. Voilà, les raisons, parmi d’autres, qui expliquent quelque part la peur que suscite Mohamed Abdel Aziz, ancien Chef de l’Etat et fauve encagé.Affaire d e la décennie Pourquoi Aziz fait si peur !

Quinze années d’exercice du pouvoir, dont dix pleinement et sans partage. Une fortune colossale. Des soutiens dans le monde financier, politique, et d’autres plus occultes au sein de l’institution militaire. Un sentiment profond d’avoir été trahi.

Une hargne de revenir au pouvoir pour régler des comptes. Voilà, les raisons, parmi d’autres, qui expliquent quelque part la peur que suscite Mohamed Abdel Aziz, ancien Chef de l’Etat et fauve encagé.Il tourne en rond depuis quelques jours. Sa liberté s’est rétrécie comme peau de chagrin. Interdit de sortir de Nouakchott il y a quelques mois, il est tout simplement interdit aujourd’hui de sortir de sa maison.

Résidence surveillée dans son palais en marbre sis au quartier des bourses de voiture, en plein quartier résidentiel de Tevragh-Zeina. Mohamed Abdel Aziz enragé a décidé tout récemment de faire le grand déballage, « si la situation continue comme ça ».

L’histoire de Mohamed Abdel Aziz, c’est une succession de coups de chances. D’adolescent décrit comme turbulent, habitué à se servir déjà tout jeune à chaque fois que quelque chose le tente, il atterrit à Meknès fin des années 70. Son ange protecteur, Ely Mohamed Vall, croyait ainsi le caser pour le dompter, dans le carcan militaire.

Le voilà, envoyé faire l’officier mécanicien. Son ascension fulgurante est presqu’un conte de fée. Garde de corps de l’ancien président Maaouiya Ould Sid’Ahmed Taya, c’est à lui à qui il pensera, lorsqu’il fallut dans les années 90, après les évènements de 89 et l’accointance avec le président irakien, Saddam Hossein, mettre sur pied, une garde prétorienne, le Bataillon de Sécurité présidentielle (BASEP).

Mohamed Abdel Aziz prend les rênes de ce puissant corps d’élite, presqu’entièrement autonome de l’Etat-major des forces armées. Un corps super équipé, super payé et super entraîné. Ses ordres, il les prend directement du Président de la République.

Les « Cavaliers du changement »

En 2003, de jeunes intrépides officiers, dirigés par un commandant en rupture de ban, prennent l’assaut du pouvoir à Nouakchott. Ils arrivent à s’emparer de l’Etat-major de la gendarmerie, la radio, la télévision, et foncent vers le palais présidentiel. Ils seront stoppés par le BASEP après plus d’une journée d’affrontements.

Le Président de la République, Maaouiya, est exfiltré de la présidence. Les meneurs du coup d’Etat finissent par abdiquer et se fondent dans la nature. Ce putsch manqué aurait beaucoup inspiré Mohamed Abdel Aziz, qui mesura la fragile protection du Chef de l’Etat.

Sa femme, Tekeiber, attachée aux services de la Première Dame, est renvoyée. S’en suit quelque temps plus tard, une note préparatoire pour le limogeage de son mari, Mohamed Abdel Aziz, et son affectation à la tête d’une unité au Nord du pays. C’était le renvoi de trop.

Coup d’Etat contre Maaouiya

Mohamed Abdel Aziz profitera d’un voyage officiel de Maaouiya en Arabie Saoudite en août 2005, pour prendre le pouvoir à Nouakchott, avec l’aide de quelques officiers de son proche entourage, dont un certain Mohamed Cheikh Ghazouani.

Ils décident de mettre Ely Ould Mohamed Vall, ancien patron de la Sûreté Nationale de Maaouiya pendant plus de vingt ans, un cousin plus âgé et plus expérimenté, à la tête d’un Comité militaire pour la justice et la démocratie (CMJD).

La classe politique approuve le départ du « dictateur » et approuve le changement anticonstitutionnel. La communauté internationale, après des condamnations purement formelles et un embargo de circonstance, se résigne à coopérer avec le nouveau régime, dont l’agenda semblait raisonnable.

Une transition de dix-neuf mois, des élections libres et transparentes auxquelles aucun membre du CMJD ne prendra part. Même s’il est au second plan, Mohamed Abdel Aziz qui ne cesse de coller au corps le chef du CMJD, aurait derrière les coulisses partagé le pouvoir avec Ely durant la période allant de 2005 à 2007.

Election et renversement de Sidi Cheikh Abdallahi

Présenté comme le candidat du CMJD, et coopté par Mohamed Abdel Aziz en personne, pour prendre la tête de l’Etat, Sidi Mohamed Cheikh Abdallahi sera élu en 2007 comme président de la République aux termes d’élections jugées, sur le plan technique surtout, comme l’une des plus transparentes de l’histoire politique de la Mauritanie.

Mais une fois installée au faîte du pouvoir, Sidi Cheikh Abdallahi, savait qu’il avait des comptes à rendre aux militaires qui l’avaient aidé à se hisser à la tête du pays. Mohamed Abdel Aziz, sera ainsi parmi les premiers officiers mauritaniens à recevoir ses galons de Général.

Son bureau sera collé à celui du Chef de l’Etat qu’il n’eut cesse de surveiller comme du lait sur le feu. Il aurait même installé à la présidence un réseau d’écoute qui lui permettait de suivre tout ce qui se tramait à la présidence, y compris les audiences de Sidi Cheikh Abdallahi. Une anecdote raconte qu’au cours d’une audience accordée à un chef de parti politique, Sidi Cheikh Abdallahi lui aurait fait comprendre par un signe, qu’ils sont sur écoute.

Puis, agacé par les pressions des généraux, la fronde des députés dirigée par Sidi Mohamed Maham, le coup d’Etat populaire préparé pour le déloger sous la manipulation des militaires, surtout de Aziz, Sidi Cheikh Abdallahi décida de mettre les grands plats sur les petits.

Dans la nuit du 6 août 2009, il décida de limoger toute la bande de généraux qui l’empêchaient de travailler sereinement. Il ne savait pas qu’il venait de signer son arrêt. Quelques heures plus tard, il est renversé, arrêté et mis en résidence au Palais des Congrès de Nouakchott.

Mohamed Abdel Aziz prend les rênes du pays. Marches de protestations politiques et populaires, embargo international, puis les fameux « Accords de Dakar », des élections présidentielles que Mohamed Abdel Aziz remporta sans surprise.

Le pouvoir absolu

De 2009 à 2014, puis de 2014 à 2019, Mohamed Abdel Aziz dirigea la Mauritanie d’une main de fer. Répression contre les défenseurs des droits de l’homme, emprisonnement d’opposants et d’hommes d’affaires récalcitrants. Beaucoup d’évènements exceptionnels se sont produits durant la décennie de Mohamed Abdel Aziz.

De grandes révolutions sur le plan social, avec le recasement de plusieurs milliers de personnes qui vivaient dans des taudis de Nouakchott, électrification, construction de routes, d’hôpitaux, d’universités et d’instituts supérieurs, dont la première faculté de médecine, des écoles d’ingénierie…

En même temps, paupérisation de certains hommes d’affaires et création de nouvelles fortunes. Deux sommets internationaux, un de l’Union africaine et l’autre de la Ligue Arabe à Nouakchott.

Une première dans les annales de l’histoire diplomatique. En revanche, Mohamed Abdel Aziz se sera servi de la Mauritanie comme d’une réserve personnelle. Lui et son entourage bâtiront un empire financier dans tous les domaines, les BTP, l’industrie du pétrole, l’agrobusiness, le tourisme, les assurances, les banques, les mines…

Fin du pouvoir politique

Après quinze années de flirt avec le pouvoir politique, Mohamed Abdel Aziz avait décidé de tourner la page. A plusieurs reprises, il annonça qu’il ne briguera pas de troisième mandat, malgré la forte pression de sa majorité politique et de son entourage. Ce refus de poursuivre l’aventure politique alors que tous les moyens le lui permettaient reste encore un mystère.

D’aucuns ont évoqué l’armée qui ne voulait pas qu’il s’éternise au pouvoir. La pétition lancée au sein de l’Assemblée nationale qui allait le plébisciter alors qu’il était en déplacement hors du pays sera nettement stoppée. Certains évoquent l’injonction des officiers de l’armée qui lui auraient enjoint l’ordre d’arrêter la mascarade.

La main à Mohamed Cheikh Ghazouani

Mohamed Abdel Aziz a ainsi choisi son dauphin. Ce sera son ami de 40 ans, Mohamed Cheikh Ghazouani, Chef de la Sûreté, puis Chef d’Etat-major des Forces Armées et enfin, Ministre de la Défense Nationale.

Aux élections présidentielles d’août 2019, il dispose déjà de la majorité politique, l’Union Pour la République (UPR), le soutien de tous les argentiers du secteur privé. Il passe sans gageur aux terme de scrutins que d’aucuns ont jugé gagné d’avance, car même son score de 54 % a été annoncée lors d’un dîner électoral organisé en marge du huis clos de la CENI, avant même que les résultats officiels ne soient annoncés.

La cabale contre Mohamed Abdel Aziz

Coup de théâtre. Au bout d’une année hors du pouvoir, Mohamed Abdel Aziz se trouve dans le collimateur de celui qu’il a hissé au sommet de l’Etat. En effet, une Commission parlementaire chargée de faire la lumière sur la gestion de la décennie Aziz, est mise sur pied. Corruption, détournements de biens publics, enrichissement illicite…

Une liste de malversations collées à Mohamed Abdel Aziz et plusieurs de ses anciens collaborateurs dont trois premiers ministres, des dizaines de ministres, directeurs centraux, gestionnaires d’institutions publiques.

Le dossier est aujourd’hui aux mains du Parquet général et un juge a été désigné pour faire la lumière sur un des dossiers les plus spectaculaires dans l’histoire judiciaire ou politique de la Mauritanie.

Le dossier traîne, Aziz craint

Depuis plus d’une année, le dossier de la décennie et son héros principal, Mohamed Abdel Aziz, tangue sans connaître une fin définitive. Plusieurs auditions, plusieurs saisies conservatoires de biens meubles et immeubles, fouilles interminables, se succèdent.

Beaucoup s’attendent à un jugement qui a du mal à se dessiner. L’énorme fortune de Aziz, supposée ou réelle, n’est pas encore cernée. Des commissions rogatoires ont été lancées à la recherche de biens fuités à l’étranger.

Aziz cherche à reconquérir le pouvoir. Du terrain judiciaire, il veut détourner son affaire sur « le champ politique ». Il se présente comme victime d’une cabale politique, d’un acharnement tribal. L’adage « Ezwaya Ma You Velchou » (il ne faut pas faire confiance aux marabouts, allusion à Ghazouani) n’a jamais pris plus de sens à ses yeux.

L’homme possède de l’argent, beaucoup d’argent. Il a encore de forts soutiens populaires, des accointances avec plusieurs hauts responsables encore dans les rouages de l’Etat, de la police, de la sûreté d’Etat, des liens étroits avec beaucoup d’hommes d’affaires, de mouchards, d’opportunistes et d’arrivistes.

On lui prête même des complicités au sein de la Grande Muette, et des relations avec pleins de réseaux internationaux, des mercenaires qui ne demandent que des oseilles en contrepartie de n’importe quel sale boulot. Aziz fait peur. Alors, on décide de l’enfermer dans son beau palais. On l’empêche de parler.

C.A

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

°Source : L'Authentique (Mauritanie)

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